mardi 1 avril 2014

47 rônin


Lesté d'une réputation épouvantable consécutive au bide au box-office américain (38 millions de dollars de recette contre 175 millions de budget, d'après l'imdb), 47 rônin commence avec une voix off caverneuse et sentencieuse qui nous affirme que « connaître l'histoire des 47 rônin, c'est connaître l'histoire du Japon ». La promesse éventuelle de découvrir un Japon authentique est immédiatement écartée dès que les personnages ouvrent la bouche : tout le monde s'exprime en anglais. A priori, faire parler les personnages en anglais quand un film se déroule en Asie n'est pas rédhibitoire. D’autres l'ont fait avec succès. Mais ici le résultat est désastreux car les acteurs japonais ont beaucoup de mal à dire leur dialogues qu'ils balbutient tant bien que mal. De plus, cela va à contre-courant de la tendance actuelle qui apportait un peu de réalisme alors que le film se vante d'être inspiré de faits réels.

Cette version des 47 rônin, très loin de celle de Kenji Mizoguchi de 1941, table sur un Japon féodal où les monstres et les démons peuplent les forêts. La scène d'ouverture montre Kai (Keanu Reeves, bien trop âgé pour ce rôle) chasser à cheval une énorme bête sauvage et chimérique, qui plus est entièrement composé en effets numériques (est-donc là que serait passé tout l'argent, difficile de la croire). Oishi (Hiroyuki Sanada), le bras droit du seigneur Asano (Min Tanaka) est sauvé par Kai qui manquait de se faire défoncer par ce monstre. Mais, fort peu reconnaissant, Oishi considère Kai comme un être inférieur. Des années auparavant, ce dernier a été sauvé d'une mort certaine par Asano mais Oishi demeure jaloux du garçon qui s'est entiché de Mika (Kô Shibasaki), la fille du seigneur. Le clan d'Asano est banni par le shogun après un complot ourdi par le seigneur Kira (Tadanobu Asano, désormais abonné aux navets après Battleship et Thor 2, le pauvre!).

Après un an d'exil (Oishi est enfermé dans un trou, Kai vendu comme gladiateur), les deux hommes vont s'unir pour combattre les traîtres et les démons avec 45 autres samourais déclassés. Hormis le belliqueux Yasuno (Masayoshi Haneda, le bras droit d'Oishi, aucun personnage ne parvient à exister parmi les 47 rônins, révélant l'incapacité du film à sortir de l'imagerie du Japon de pacotille qu'on veut vendre au spectateur. Rien ne manque, de jolis costumes bien repassé, des décors gigantesques, des cerisiers en fleur, de la neige qui tombe. Mais c'est un Japon sans villageois qu'on découvre, seulement peuplé de samouraïs qui luttent pour leur propre cause, pour sauver leur honneur et vanter la loyauté, sans doute le plus gros cliché du film qui n'émet aucune réserve ou critique sur l'absurdité de ce Japon féodal.

47 rônin ambitionne d’être un grand récit épique avec son histoire d’amour contrarié entre Kai et Mika. Cette dernière a été enlevée par Asano qui l’a prise comme trophée et qu’il se jure d’épouser. Pour retrouver sa bien-aimée, Kai affronte les démons dont la sorcière (Rinko Kikuchi) aux yeux vairons qui jette des sorts et peut se transformer à sa guise, en renard blanc (trop kawaï !!!), en serpent ou en vapeur (mais ça fait même pas peur). Il va demander pour cela de l’aide à son ancien mentor, un moine qui ressemble à Voldemort. Les effets spéciaux sont tout juste corrects et le combat final est à peine chorégraphié. La musique, horrible, ne s’arrête jamais. Mais ce qui finit de plonger le film dans l’ennui total est le sérieux constant et l’absence totale d’humour ou d’un personnage secondaire qui apporterait un peu de légereté au milieu de toute cette lourdeur.

47 rônin (Etats-Unis, 2013) Un film de Carl Rinsch avec Keanu Reeves, Hiroyuki Sanada, Kô Shibasaki, Tadanobu Asano, Min Tanaka, Jin Akanishi, Masayoshi Haneda, Hiroshi Sogabe, Takato Yonemoto, Hiroshi Yamada, Shû Nakajima, Cary-Hiroyuki Tagawa, Rinko Kikuchi, Natsuki Kunimoto.

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