samedi 20 juillet 2013

Opération dragon


Les célébrations des quarante ans de la disparition de Bruce Lee (le 20 juillet 1973) sont l’occasion de revenir sur son dernier film complet. Opération dragon est le plus gros succès populaire de l’acteur (en France, cinquième meilleur score au box office en 1974). Succès qu’il n’a jamais pu savourer, le film étant sorti après sa mort. Après une vingtaine de films à Hong Kong alors qu’il était enfant (par exemple The Kid en 1950) puis adolescent (difficile de les voir) et après ses trois films en cantonais pour la Golden Harvest (The Big boss, La Fureur de vaincre et La Fureur du dragon), il s’agissait pour Bruce Lee d’étendre sa notoriété en dehors de l’Asie. Mais surtout de prendre sa revanche sur son rôle de larbin dans Le Frelon vert, son unique incartade aux Etats-Unis en 1966, rôle pour lequel il avait une haine féroce.

Pour faire ses preuves au public occidental (puisque le public asiatique est déjà conquis), il faut à Bruce Lee commencer son film par une démonstration de son art martial. Le public dans le film est un parterre de moines Shaolin L’adversaire contre lequel Lee se bat est Sammo Hung. Ils sont tous les deux en slip noir, les rendant un peu ridicules. Puis, Lee s’entretient longuement (en anglais, car le film est entièrement en anglais) avec son sifu (Roy Chiao). Ils causent philosophie tandis qu’ils marchent lentement dans un jardin. Enfin, Lee donne un cours à un apprenti. En faisant suivre ces trois scènes, il s’agit de montrer que le personnage de Lee, et donc l’acteur Bruce Lee, possède une force mentale et physique indépassables, que l’une ne va pas sans l’autre et que la première force aide la deuxième à vaincre les adversaires.

Après avoir combattu loyalement son condisciple, Lee va relever le défi de se battre contre d’autres adversaires dans une compétition organisée sur une ile par Han (Shih Kien), ancien moine renégat. Lee s’y rend comme agent infiltré pour la police de Hong Kong. Là, le film tente de prendre un versant de récit d’espionnage à la James Bond. Lee doit enquêter sur un éventuel trafic de drogue dont Han serait à la tête. Pour tout dire, cette partie d’Opération dragon a considérablement mal vieillie tant les enjeux restent superficiels. Au récit s’ajoute un désir de vengeance. Lee a appris que l’un des gardes du corps de Han est responsable de la mort de sa petite sœur. On découvre son calvaire dans un flash-back tandis que Lee se rend en bateau sur l’île. Là, il aura comme agent de liaison la belle Mei-lin (Betty Chung), agent infiltré.

Chaque combattant a sa propre raison d’aller remporter le tournoi. Williams (Jim Kelly) est victime du racisme ordinaire. Roper (John Saxon) a des dettes d’argent. Parsons (Peter Archer) aime se battre et humilier les Chinois. Le premier combat oppose Parsons et Williams. Le deuxième Roper et un chinois. Elaborés sur un mode humoristique où Roper et Williams parient sur le vainqueur, les combats restent de simples démonstrations de boxe. Le lendemain, Han veut punir ses vigiles qui ont manqué à leur devoir, l’ultra musclé Bolo Yeung les laminera. La violence commence à gagner le film puis à envahir les affrontements. Han, qui a une main de fer (au sens figuré comme au sens propre) se battra contre Williams. Ce dernier n’en sortira pas vainqueur.

Ce n’est finalement qu’au bout d’une heure de film que Lee commencera à entrer dans le tournoi. Son adversaire est O’Hara (Robert Wall), le sbire balafré de Han qui a tué sa sœur. Sa vengeance peut enfin s’accomplir. Le combat est relativement court, environ trois minutes. Bruce Lee donne ses coups avec précision en poussant ses petits cris tandis qu’O’Hara déshonore son patron en cherchant à piéger Lee, notamment en voulant l’attaquer avec des tessons de bouteille. Enfin, il reste à Lee à mener sa mission anti-drogue. Il pénètre dans les sous-sols de la demeure, se met torse nu, actionne son nunchaku et frappe les gardiens (dont Jackie Chan qu’on peine à reconnaitre). Il rentre alors en transe bandant tous les muscles de son corps et de son visage. Opération dragon va crescendo dans les combats et le dernier est le plus beau. Lee se bat contre Han dans une salle aux murs en miroir. L’image de Bruce Lee se démultiplie à l’infini et, avec elle, les blessures au sang que la main griffée de Han lui assène.

Les décors ont une grande importance dans le film. On passe des bidonvilles de la baie de Hong Kong au riche palais de Han, ultra kitsch saturé de couleurs vives. La scène de repas, où l’on aperçoit Wong Tin-lam et Yuen Wah, où tous les invités se bâfrent avec à leurs pieds des jeunes femmes tandis que deux sumotori s’affrontent, est là pour contraster avec la rigueur de Shaolin présentée en début de film. Han, outre sa pièce tout en miroir, possède un musée de la torture et une pièce mauve où ses filles se font tatouer. Il faut ajouter que la musique de Lalo Schifrin permet à la fois de faire passer quelques scènes poussives et de magnifier certains combats. Robert Clouse a utilisé les images tournées par Bruce Lee pour Le Jeu de la mort et tenté, en vain, de renouveler le succès d’Opération dragon avec Jackie Chan dans Le Chinois.

Opération dragon (Enter the Dragon, 龍爭虎鬥, Etats-Unis – Hong Kong, 1973) Un film de Robert Clouse avec Bruce Lee, John Saxon, Jim Kelly, Betty Chung, Ahna Capri, Robert Wall, Shi Kien, Bolo Yeung, Angela Mao, Hao Li-jen, Roy Chiao, Lau Wing, Tin Mat, Sammo Hung, Jackie Chan, Mars, Cheung Chok-chow, Wong Tin-lam, Yuen Wah, Yuen, Biao, Yuen Bun, Philip Ko.

Aucun commentaire: