mercredi 22 août 2012

Tokyo park


Cela faisait un bon moment qu’il n’avait pas été possible de voir un nouveau film de Shinji Aoyama, comme si le réalisateur encensé après Eureka et ses 3 heures 37 minutes de film et totalement ignoré avec La Forêt sans nom était totalement oublié aujourd’hui. La sortie estivale de son dernier film Tokyo park montre un cinéaste à la fois modeste (peu d’acteurs, peu de scénario, peu de décors) et ambitieux (une volonté d’aller dans le cinéma de genre et d’aborder plusieurs sujets tabou). Au centre du récit de son film, Koji Shida (Haruma Miura), jeune étudiant de 22 ans, photographe à ses heures et qui aime se promener dans le parc à côté de chez lui.

Dans ce parc justement, il prend en photo une dame qui promène sa petite fille en poussette. Image charmante qu’un homme interdit à Koji de photographier. Paradoxalement, cet homme, dentiste de son état (Yo Takahashi) va le payer pour surveiller cette maman (Haruka Igawa), qui s’avère être sa femme. Il la soupçonne d’adultère. Cependant son appareil photo argentique est trop lourd, il a besoin d’un numérique plus compact et léger pour espionner cette femme qui commence à intriguer le jeune Koji, par ailleurs célibataire bien que très entouré. L’épouse semble également avoir remarqué ce jeune homme qui la suit dans de nombreux parcs tokyoïtes, ce qui donne l’occasion de visiter la ville au spectateur (on voir pas si souvent que ça des parcs dans le cinéma japonais) et à Shinji Aoyama de s’épargner de créer des décors extérieurs.

Cet appareil numérique, il l’emprunte à Hiro (Shota Sometani) son colacataire. Hiro, habillé avec une drôle de tenue, constamment la même, est un peu inerte. C’est logique, il est mort et son enveloppe charnelle traine encore dans l’appartement où aucune de ses affaires ne semblent avoir bougé. Le soir, Koji est serveur dans un bar tenu par Takashi (Kenichi Haraki), un vieil homo devenu l’un de ses plus proches. Parmi les clientes, Miyu (Nana Eikura), sa meilleure amie et l’ex de Hiro. La filiation du film de fantôme se poursuit puisque Miyu est un fan du cinéma d’horreur avec vampires, zombie et morts-vivants. On découvre dans Tokyo park un extrait d’un film titré « Vampires zombies » aux effets horrifiques involontairement comiques. Miyu a beau citer deux trois noms (dont Romero évidemment et Eisenstein), elle ne semble pas faire la différence entre un navet et un bon film. Ce qui l’intéresse est d’avoir peur. Elle regrette du coup beaucoup de ne pas pouvoir voir son ex défunt.

L’autre cliente assidue du bar est la demi-sœur de Koji. La mère de Misaki (Manami Konishi) a épousé le père de Koji. Elle a une grande affection pour son demi-frère, une affection trouble que tous les personnages interrogent. Là est le nœud narratif du film que le réalisateur décline en longs plans séquence où les personnages s’expliquent longuement sur fond de musique jazz. Tokyo park a de quoi séduire mais il faut pour cela subir un rythme un peu bancal, parfois très mou en écho au caractère velléitaire de Koji (les discussions avec sa sœur), parfois plus vif (les confrontations lors de superbes scènes de repas – le beignet de porc suivi de pâtisserie arrosés au vin rouge – avec Miyu, le personnage le plus énigmatique). C’est gênant parce que le film tente le coup de force scénaristique et le coup de poing émotionnel dans sa dernière demi-heure, sans y parvenir. C’est finalement le trio Koji – Miyu – Hiro qu’on a le plus envie de suivre et qu’on attend chaque fois que le film part vers un autre personnage.

Tokyo park (Tokyo koen, 東京公園, Japon, 2011) Un film de Shinji Aoyama avec Haruma Miura, Nana Eikura, Manami Konishi, Haruka Igawa, Shota Sometani, Yo Takahashi, Takashi Ukaji.

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