jeudi 5 novembre 2009

Visage


Par où commencer ? C’est la vraie question que je me suis posée en regardant les 2h21 de Visage. Les photos vues ici et là du dernier très long métrage de Tsai Ming-liang avaient excité mon imaginaire. Superbes photos énigmatiques et poétiques qui laissaient envisager un esthétisme neuf chez le cinéaste. Le film est produit par le Musée du Louvre et on était en droit d’attendre de superbes plans comme il sait tant en faire. Un film composé de tableaux en quelque sorte. Et c’est le cas, parfois.


Alors par où commencer ? Le scénario ? Encore moins que dans Good bye Drgon Inn et I don’t want to sleep alone, on est devant une bribe de scénario. En gros, on pourrait dire que Li Kang-sheng serait un jeune réalisateur venu de Taïwan, tandis que sa mère (Lu Yi-ching) vient de mourir, tourner une adaptation de Salomé avec Jean-Pierre Léaud, Fanny Ardant et Laetitia Casta. J’avoue mon inculture, je ne connais rien de l’histoire de Salomé. Je suis donc incapable de dire où sont les références. Lors du tournage, le cerf nécessaire à une scène sous la neige a disparu. Les « personnages » vont le chercher. Enfin, ils ne bougent guère de leurs places et l’appellent seulement.


Voici le descriptif de quelques scènes éparses de Visage. Li Kang-sheng cherche le cerf. Dans un bosquet, il rencontre Mathieu Amalric qui drague. Ils se regardent, se touchent un peu, s’embrassent et se sucent tandis que le téléphone de Li Kang-sheng sonne. Ailleurs, Li Kang-sheng discute avec Jean-Pierre Léaud, dont le personnage s’appelle Antoine, de cinéma. Jean-Pierre Léaud vient de recueillir un oisillon dans la neige. Ils parlent « des petits et grands oiseaux » et un long name dropping commence entre les deux : Pasolini, Antonioni, Orson Welles (deux fois) et d’autres. Encore ailleurs, Laetitia Casta prend du scotch noir et en calfeutre les fenêtres et les miroirs. Le tout en plan séquence. Et d’autres scènes bizarres encore.


Visage se veut un hommage à François Truffaut. Comme déjà écrit, Jean-Pierre Léaud est là en tant qu’Antoine. Il a de plus en plus de mal à s’exprimer. Il est vieux Léaud et il semble en roue libre. Fanny Ardant, la dernière épouse de Truffaut, feuillette des bouquins sur le cinéaste, elle déploie un petit livre de photos animées avec la fin des 400 coups, la scène où Antoine Doinel court sur la plage. Dans une autre scène, Jeanne Moreau, Fanny Ardant et Nathalie Baye sont à table et discutent de rien puis boivent un verre de vin. C’est un hommage bien peu subtil où tout est surligné et qui semble posé là de manière forcée.


Tsai Ming-liang en venant en France a perdu beaucoup de son charme. Ses longs plans séquence ne sont que des plans séquence. Tout humour burlesque a disparu et cela est bien regrettable. Pourtant, il est là le charme fou du cinéaste. Au début du film dans une séquence située à Taiwan où il filme en un seul plan l’inondation de la cuisine due à un robinet cassé. L’eau reste une obsession de Tsai Ming-liang. Il est encore quand Laetitia Casta chante en playback trois chansons chinoise (et une en espagnol) chorégraphiées par Découfflé. Là on est en terrain connu. Le reste de Visage est un peu abscons mais très joli. Un film bien inutile.


Visage (, Taiwan – France – Belgique – Pays-Bas, 2009) Un film de Tsai Ming-liang avec Li Kang-sheng, Lu Yi-ching, Jean-Pierre Léaud, Fanny Ardant, Laetitia Casta, Mathieu Amalric, Jeanne Moreau, Nathalie Baye.

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