mardi 29 avril 2008

Le Sang séché


Un patron a réuni tous ses employés sur le toit d’un immeuble. Il leur annonce qu’ils vont être licenciés parce que l’entreprise est en crise. Takashi Kiguchi s’approche alors de son patron en traversant la foule de ses collègues médusés. Il sort un pistolet de sa poche et tente de se suicider. Son collègue Kanai l’empêche d’accomplir son geste de désespoir. Kiguchi demandait à la direction de ne pas licencier s’il se suicidait.
Yuki Nonaka travaille dans une société d’assurances. Elle voit en Kiguchi l’homme qui pourra illustrer la prochaine campagne de publicité de la compagnie. L’homme voulait se suicider par altruisme. La slogan sera « Il est grand temps que vous soyez tous heureux ». Dans toute la ville, Mademoiselle Nonaka placarde d’affiches Kiguchi, le canon d’un révolver sur la tempe, le visage grave. Tout le monde ne parle bientôt plus que de cela et Kiguchi est invité partout : télévision, colloque etc. L’affaire s’avère rentable et la compagnie d’assurances voit le nombre de ses clients augmenter.
Harada est l’amant occasionnel de Yuki Nonaka. Il exerce la crapuleuse profession de paparazzi. Il truque ses reportages en soûlant ses futures victimes et en faisant poser à leur côté un mannequin. Harada veut la peau de Kiguchi et va tout mettre en œuvre pour lui pourrir durablement la vie, malgré les protestations de Yuki. Il prétend agir au nom de l’honnêteté, ne voyant dans le suicide raté qu’une manipulation. En fait, il est jaloux que sa maîtresse passe plus de temps avec son client qu’avec lui.
Kanai est de la partie dans la campagne publicitaire. Le sauveur de Kiguchi se révèle être un homme vil, un parasite. Il trouve là l’occasion inespérée de gagner sa vie. Son geste était sincère mais sa vénalité prend le dessus. Tout se passe bien jusqu’à ce que Kiguchi se prenne réellement au sérieux et se voit comme un sauveur de la société toute entière. Il veut se faire le porte-parole des gens qui n’ont pas accès aux médias, mais c’est sans compter sur ceux qui veulent que rien ne change.
Le Sang séché est un film politique filmé comme dans l’urgence à la caméra à l’épaule. Le propos de Yoshida est clairement à gauche, clairement du côté des ouvriers et des travailleurs et clairement contre ceux qui n’ont d’autre ambition que de faire du fric pour faire du fric. De ce point de vue, le film est d’une incroyable actualité. Le piège dans lequel Kiguchi s’est progressivement enfermé est montré par le cinéaste avec une rage devenue très rare d’autant qu’elle s’accompagne d’une atmosphère mortifère. En substance, Le Sang séché dit que le capitalisme c’est la mort de l’humain.
Mais ce discours puissant ne serait rien s’il venait seul et s’il se suffisait lui-même. Yoshida avec des moyens très simples fait beaucoup d’effets. Ce qui frappe le plus est le son. Le film commence par celui de gouttes qui tombent d’un robinet. L’ambiance sonore est très vite partie prenante de l’image : klaxons omniprésents des voitures qui marquent une urbanité folle, sons des pelles mécaniques dans la scène de la décharge où le paparazzi prend des photos. Il se réserve aussi des moments plus festifs comme les séquences dans la discothèque avec des chansons de variété au montage saccadé.
Au milieu du film, il y a aussi une scène très forte entre Harada et Yuki. Une scène de sexe filmé dans un pénombre quasi crépusculaire où le sort de Kiguchi se joue bien malgré et qui scinde le film en deux parties. L’ascension sociale n’aura que peu duré et la chute de notre anti-héros ne fait que recommencer. Le propos de Yoshishige Yoshida est à la fois d’une extrême noirceur et d’un fatalisme bien peu romantique. Il ne sauve personne.
Le Sang séché (血は乾いてる, Japon, 1960) Un film de Yoshishige Yoshida avec Keiji Sada, Kaneko Iwasaki, Shinichirô Mikami, Mari Yoshimura, Masao Oda.

lundi 28 avril 2008

As tears go by



As tears go by, tourné en 1988 à Hong Kong a été présenté en France au Festival de Cannes 1989. Pas en compétition officielle, mais à la Semaine de la Critique, une des sections off dont la sélection est préparée depuis près d'un demi siècle par des critiques de cinéma. Le film est passé relativement inaperçu auprès de la presse. A l'époque, le cinéma de Hong Kong était tricard en France. Le nom de John Woo n'était connu que de quelques fans transis. Celui de Tsui Hark tombé dans les oubliettes (Mad Mission 3 était sorti cinq ans auparavant et aucun autre de ses films n'a eu l'honneur d'une diffusion). Le cinéma de la colonie britannique se résumait à vrai dire aux films de Jackie Chan et à ceux de King Hu ; autant dire à des miettes. On peut trouver quelques chroniques dans la presse cinéma sur As tears go by. Critiques bien peu élogieuses.

Le scénario de As tears go by est simple. Wah (Andy Lau à peine reconnaissable) est un petit malfrat. Son meilleur ami Fly (Jacky Cheung) est son acolyte dans ses affaires louches. La jeune Ngor (Maggie Cheung encore moins reconnaissable que Andy Lau) vient se faire soigner les poumons et demande à être hébergée chez Wah, qui est son cousin. Wah vient de se faire larguer par sa copine. Fly, tout fanfaron qu'il est, a bien du mal à récupérer de l'argent chez un de ses " protégés ". Petite histoire de polar entre truands au milieu desquels se retrouve une jeune fille naïve et innocente. Rien de bien neuf.

Le film commence pourtant différemment des autres polars de Hong Kong. Plutôt que de planter l'action de son film, censé être un film d'action, avec justement de l'action, c'est-à-dire de montrer Fly en train de demander de l'argent au l'autre type, Wong Kar-wai choisit de laisser tout cela hors champ. Quand As tears go by commence, Andy Lau est en train de roupiller. Le téléphone sonne. C'est sa tante qui lui dit qu'elle rappellera quand il sera levé. Mais elle téléphone peu de temps après pour dire que sa cousine Ngor va venir loger chez lui. " Ah bon, j'ai une cousine ! " Wong Kar-wai fait en quelque sorte un film d'inaction pour l'instant.

Maggie Cheung arrive. C'est une gentille fille sage. Elle porte une robe bien droite et ses cheveux sont longs et gentiment coiffés. Elle s'excuse d'arriver comme ça. Wah en a un peu rien à foutre. Ce qui l'intéresse, c'est de dormir et de ne pas être dérangé par le téléphone. Ngor répond aux coups de fils. C'est Fly qui n'arrive vraiment pas à avoir son argent. Il n'est pas du tout étonné que la cousine de Wah réponde. As tears go by débute donc dans le comique de situation et sa mise en scène nous signale déjà que son histoire de petits truands ne le passionne pas.

Il se résoudra pourtant à accomplir quelques scènes de baston. Il a signé pour un film d'action, faut-il le rappeler. Les bagarres sont filmées de manière très classique avec beaucoup de plans qui ont du mal à convaincre. Wong sent bien qu'il n'est pas doué pour ça. Le cinéaste filmera même une poursuite dans les rues, celles très peuplées du quartier de Mongkok où se passe le film. Il joue déjà avec le ralenti comme plus tard dans Chungking express, mais l'usage du ralenti était très répandu dans les polars de John Woo de cette période. Il ne détourne pas encore complètement la commande, comme plus tard dans Les Cendres du temps où il ne filme que des moments de creux.


Ce qui rattache As tears go by avec les films suivants de Wong Kar-wai est autre chose. Il s'agit d'abord des rapports entre les personnages de Maggie Cheung et Andy Lau. Ils discutent beaucoup dans des lieux triviaux, comme ce plan séquence dans la cuisine où ils mangent des nouilles. Finalement, c'est une histoire d'amour impossible entre eux que Wong Kar-wai veut filmer, comment ces deux là vont arriver à coucher ensemble. A ce propose, que faut-il entendre dans le terme " cousin " qu'ils sont supposés être ?

Autre récurrence, la fascination du cinéaste pour la cigarette, pour ses volutes de fumée. Paradoxe puisque Maggie Cheung est malade des poumons. Mais le glamour de la cigarette prime sur la cohérence du scénario. Le personnage de Maggie Cheung prétend être amoureuse du médecin qui la soigne, médecin que l'on aperçoit dix secondes dans le film et qui ne réagit pas quand Maggie tombe dans les bras de Andy Lau.

Toujours une affaire de souffle, pendant toute une séquence où Wah est blessé et où Ngor le soigne, on entend Take my breath away, dans une version chantée en cantonais par Sandy Lam, très populaire à l'époque et encore maintenant d'ailleurs. La séquence dure dix bonnes minutes. La chanson a peut-être été imposée à Wong Kar-wai, mais il l'utilise comme il le fera plus tard avec le Happy together des Turtles ou le tango dans In the mood for love.

Pour finir, on parlera de l'aspect chromatique de As tears go by qui, bien que moins soigné qu'ultérieurement, est défini par une opposition claire entre le bleu et le rouge. C'est d'ailleurs Andrew Lau qui est le chef opérateur. Christopher Doyle ne travaillera avec Wong qu'après ce film. As tears go by est souvent filmé de nuit et encore plus souvent à l'intérieur de l'appartement de Wah et parfois dans un bar. L'image est constamment sombre comme mal éclairée. C'est dans ces séquences noires que se déroulent les moments heureux de Wah et Ngor. C'est en plein jour que la mort arrive.

As tears go by est-il un bon film ? Est-il un bon film de Wong Kar-wai ? C'est un polar un peu différent. C'est sans doute une des raisons qui ont fait que ce film a séduit en 1989 quelques critiques de cinéma français qui l'ont sélectionné à Cannes. Il devra quand même atteindre cinq ans avec Chungking express pour voir un de ses films distribués en France, avant de connaître l'engouement, parfois délirant, pour ses trois derniers films un peu surfaits, mais ce n'est que mon avis. Par ailleurs, Andy Lau et Jacky Cheung se sont retrouvés dans un film de triade très intéressant en 2004, La Voie du jiang-hu de Wong Chin-po, où ils étaient deux quadragénaire qui se rappelaient leurs jeunesses. On signalera aussi la mauvaise qualité de la copie du DVD de As tears go by, toute tachetée donc non nettoyée.

As tears go by (旺角卡门, Hong Kong, 1988) Un film de Wong Kar-wai avec Andy Lau, Jacky Cheung, Maggie Cheung, Alex Man, Ronald Wong.

vendredi 25 avril 2008

Playboy cops


L’un est beau, jeune, riche et intelligent. Il s’appelle Michael. L’autre est beau, jeune, riche et intelligent. Il s’appelle Lincoln. Les deux hommes ne sont pas amis. Ils se disputent la même femme, Lisa, qui est jeune, belle, riche et intelligente. Telle est la dure vie des gens beaux, riches, jeunes et intelligents de Hong Kong.
Michael (Shawn Yue, très en forme, il est devenu un bon acteur) est un flic. Sa méthode pour arrêter les truands est particulière. Il les piège en déposant des liasses de billets (des grosses coupures) et les truands sont pris au piège. Michael est le fils d’un riche homme d’affaires (Danny Lee qui fait une courte apparition comme pour passer le relais) et il dépense sa fortune à traquer les vilains. Il donne de l’argent aux indics et conclue ses enquêtes plus vite que ses collègues. Mais ses méthodes sont peu appréciées par son chef, interprété par un Vincent Kok qui cabotine toujours aussi bien.
Michael et Lincoln se rencontrent au commissariat. Lincoln (Aloys Chen) recherche son frère qui a disparu. Son seul indice vient d’un indic qui affirme que les kidnappeurs ont un scorpion tatoué sur la nuque. Lincoln va demander de l’aide à Michael mais ce dernier refuse tout d’abord jusqu’à ce que Lisa (Linda Chung), qu’il drague sans succès, le convainc. Ce que Michael ignore, c’est qu’elle connaît bien Lincoln puisqu’ils sortent ensemble. Michael accepte et finalement les deux gars vont devenir amis, puis complices bien qu’ils soient rivaux concernant Lisa.
Les deux sales gosses vont circuler en voiture de sport à la recherche de renseignements. Idéal pour aller dans les bas quartiers. De plus, ils sont en costume cravate. Ils ne passent pas inaperçus. Michael porte des baskets blanches, ce qui semble montrer son côté rebelle. Bref, ils vont vite troquer leurs beaux costards pour des tenues plus décontractées, notamment des polos Lacoste, un des sponsors du film. Le placement de produit de la marque de vêtements est très visible, jusqu’à la caricature.
Les investigations continuent sur un rythme cool. Ils rencontrent de temps en temps un obstacle et ils se battent. Ils affrontent dans un club de tatoués Hung Yan-yan (le Pied-bot dans Il était une fois en Chine, le méchant dans The Blade). Je me demandais ce qu’il devenait. Hung est toujours en forme et la scène de baston est sympa et drôle.
Playboy cops va, dans sa première heure, régulièrement changer de régime : une scène de beaux gosses en bagnole, une scène de baston et une scène où ils retrouvent Lisa pour boire et manger. C’est cool, joli à regarder, très à la mode. Jingle Ma nous divertit sans problème. C’est aussi agréable que de siroter un verre de Martini sous une terrasse ombragée en été.
En revanche, la dernière partie devient carrément de type Catégorie III. Lisa est enlevée par des très méchants qui flinguent les figurants à tout de bras. Là apparaît le méchant ultime du film. Méchant, qui dans un twist très hollywoodien, sera une connaissance de nos trois héros. Il coupe le bras du papa de Lisa à la tronçonneuse. Il sectionne le doigt de la demoiselle avec un tesson de bouteille. Il enferme Lincoln et Michael dans une cage et les oblige à se taper dessus. On passe à la sauvagerie en deux temps trois mouvements.
Playboy cops renoue avec la comédie d’action des années 1980, celle que j’aime tant. Du cool et de la violence. Jackie Chan, Sammo Hung ou Yuen Biao n’étaient pas des top-models. Shawn Yue et Aloys Chen le sont. Du coup, une question se pose: à qui s’adresse le film ? Aux fans d’action pure ou aux jeunes filles fans d’acteurs à la mode ? Finalement, c’est d’autant plus intéressant de constater que dans l’industrie, il y a encore quelques décideurs qui font exploser les standards habituels, et c’est plutôt une bonne nouvelle. Cela dit, le film n’est pas sans défaut, loin de là. Les scène dites d’émotion sont toujours trop longues (la scène de l’hôpital et le final touchent au pathos le plus mièvre) et le scénario n’est pas un modèle de construction narrative. Mais je ne gâche plus mon plaisir pour de telles considérations. C’est assez agréable à regarder.
Playboy cops (花花型警, Hong Kong, 2008) Un film de Jingle Ma avec Shawn Yue, Aloys Chen, Linda Chung, Shaun Tam, Wong You-nam, Danny Lee, Hung Yan-yan, Vincent Kok, Ella Koon.

jeudi 24 avril 2008

Sorties à Hong Kong (avril 2008)

Happy funeral (六樓后座2 家屬謝禮)

Un film de Barbara Wong avec Tian Yuan, Lo Chung-him, Kong Yeuk-lam, Fama, Donald Tong, Siu Ye-jim, Eric Tsang, Dang Chi-fung, Hau Woon-ling, Karena Lam, Candy Lo, Lawrence Chou, Sammy, Stephanie Cheng, Freeze, Raymond Wong Pak-ming, Ricky Fan, Philip Ng, Lollipop. 101 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 24 avril 2008.





The Forbidden kingdom (功夫之王)

Un film de Rob Minkoff (Etats-Unis) avec Jet Li, Jackie Chan, Li Bingbing, Colin Chou, Liu Yefein. 105 minutes. Classé Catégorie IIA. Sortie : 24 avril 2008.




mercredi 23 avril 2008

Cannes 2008 : la Sélection Officielle


Cannes 2008 se prépare activement cette année, comme tous les ans. Sean Penn sera Président du Jury, Apichatpong Weerasethakul sera un de ses Jurés stars. Les journalistes pourront apprendre son nom et être fiers de le réciter par cœur. Hou Hsiao-hsien sera président du jury de la sélection des courts-métrages.

Et les films dans tout cela ? On se rappelle que la sélection officielle l’an dernier avait été misérable – et surtout misérabiliste (les films de Cannes 2007). Les sorties des films sélectionnés se font de plus en plus rares et sont de plus en plus tardives. Stephen Chow est encore une fois oublié…

Ceux qui ne sont pas oubliés pour prétendre à la Palme d’or sont Jia Zhangke avec 24 city, qui fait maintenant deux ou trois films par an. Eric Khoo qui, après le superbe Be with me, présenta My magic, sans doute un film de Singapour pour la toute première fois. Brillante Mendoza, le réalisateur de John John sera là avec Serbis. Ça ne fait guère pour l’instant, mais le sélectionneur rajoute toujours quelques films avant le début du festival.

Hors compétition, Kim Jee-woon présentera The Good the bad the weird, mais je n’attends rien de ce (mauvais) réalisateur surtout avec un titre de ce genre qui sent bon le postmoderne. Un autre Coréen présentera son premier film (donc un candidat à la Caméra d’or), c’est Na Hong-jin avec The Chaser. Quant à Wong Kar-wai, déjà bien mal en point avec son minable My blueberry nights, il présente une version redux des Cendres des temps, son plus mauvais film. Ça fait déjà peur !

Dans la section Un certain regard, trois cinéastes sont allé filmer Tokyo dans un film qui s’appelle Tokyo. Michel Gondry, Léos Carax et Bong Joon-ho sont derrière la caméra. Ça peut être pas mal. Toujours Tokyo, mais vu par Kyioshi Kurosawa, ça s’appelle Tokyo sonata. Pour continuer, un film chinois Yi ban haishui yi ban huoyan de Liu Fendou et un film taïwanais pour finir, Parking de Chung Mong-hong.

Jackie Chan devrait monter les marches puisque Kung-fu panda, dont il fait la voix, sera présenté hors compétition. Il sera la seule présence de Hong Kong.

mardi 22 avril 2008

Femmes de yakuzas


Madame Tamaki Awazu esr femme de yakuza. Ça n’est pas son métier, c’est sa position. Et parce que son mari de yakuza est en prison, c’est elle qui a pris en charge la tête du clan. Elle a 500 hommes à diriger, 500 yakuzas et elle les mène à la baguette en attendant que son mari revienne pour reprendre sa fonction. Il doit sortir dans trois mois mais en attendant ça va barder dans le milieu.

Le film d’Hideo Gosha commence justement par une fête trimestrielle où toutes les femmes de yakuzas en prison se retrouvent pour s’amuser. Elles vont chanter au karaoké, danser, boire des verres, oublier leur situation et la pression de femmes « célibataires ». Tamaki reçoit la visite de la femme du parrain Domoto. Elle se jurent chacune l’une l’autre loyauté et soutien. Mais le parrain meurt soudainement et le clan va exploser.

Tamaki a une sœur, célibataire, qui vit chez leur père qui n’a aucun rapport avec les yakuzas. Cette sœur, Makoto, va se retrouver au centre du récit de Femmes de yakuzas, bien malgré elle. Tamaki veut la fiancer avec le fils d’un patron d’une grosse entreprise d’immobilier. Elle accepte d’abord, contrainte et forcée. Un autre homme fait irruption dans sa vie, l’apprenti yakuza Banji qui est amoureux d’elle et qui s’installe chez le père. Mais la rencontre avec Sugita va changer sa vie

Sugita est un yakuza. Elle l’ignore d’abord mais elle comprend en voyant ses tatouages lors d’une scène où, après l’avoir draguée, il la viole. Mais Makoto va tomber amoureuse de lui et l’épouser au grand dam de Tamaki. Car Sugita est l’homme de main de Koizo, le chef du clan qui a fait sécession et qui veut assassiner le nouveau parrain.

Makoto pensait pouvoir échapper au monde des yakuzas, mais c’est peine perdue. Sa sœur Tamaki, qui voulait l’épargner, ne pense désormais plus qu’à prendre la tête du clan. Aucune réconciliation entre les clans ne semble possible et c’est Makoto qui va faire les frais de cette gangrène qui va pourrir Tamaki et en faire un monstre. Avoir le pouvoir, être la chef des yakuzas d’Osaka est son unique ambition et tout obstacle devra être éliminé.

Femmes de yakuzas commençait presque comme une comédie. Au fil de son développement, la noirceur vient plonger tous les personnages dans les affres de la déchéance. Plus Tamaki veut s’élever dans la hiérarchie du milieu, plus Makoto va sombrer et perdre de son humanité. Cette dernière aspirait à une vie classique d’épouse. Habillée en habits occidentaux, elle va s’opposer à Tamaki qui porte le kimono traditionnel jusqu’à une scène paroxystique, filmée en plan séquence, où elles vont en venir aux mains.

Gosha propose une mise en scène implacable de cette descente aux enfers dans le monde des yakuzas. On saura très vite de quel côté il se place. Détail amusant : il adore lui aussi filmer les pieds des femmes. Tarantino n’est pas le seul à avoir cette délicate manie.

Femmes de yakuzas (極道の妻たち, Japon, 1986) Un film d’Hideo Gosha avec Iwashita Shima, Katase Rino, Sera Masanori.

dimanche 20 avril 2008

Mongol


Avant d’être Gengis Khan, Gengis Khan s’appelait tout simplement Temujin. Mongol racontera l’histoire de Temujin avant qu’il ne devienne l’empereur de la moitié du monde, comme on dit. On commence donc dans l’enfance quand notre futur chef de clan n’a encore que neuf ans. Auparavant, Mongol nous aua montré Tadanobu Asano, le visage buriné attaché dans une cage. Le film tendra à nous montrer comment il s’est retrouvé prisonnier et comment il va s’en sortir.

Départ du récit avec cet enfant qui est amené par son père dans la tribu des Merkits dans le royaume du Tangut, afin de choisir une femme. Elle sera Borte, elle sera consentante voire à l’initiative de leur futur amour. Ils se retrouveront dix ans plus tard pour se marier, mais entre temps, Temujin sera blessé et laissé pour mort. Borte sera promise à un autre, mais Temujin revient et se fait un ennemi. L’homme se montre d’une fidélité à ses engagements et telle est sa devise selon Bodrov.

Temujin deviendra donc une bête de guerre pour une femme quand bien même on lui conseille de ne jamais faire la guerre pour cette raison. Temujin va s’allier avec Jamuha qui deviendra son ennemi et le vendra, à cause d’une femme, à cause de pouvoir, à un seigneur de Tangut. Jamuha, qui porte presque une coiffure d’iroquois, sera malgré lui un de piliers qu fabriquent Gengis Khan. Ils sont peu nombreux les gens qui reconnaissent en cet impétueux Temujin le futur empereur. Il y a Borte, sa femme et un moine bouddhiste qui avertit le roi de Tangut que cet homme détruira son royaume.

Bodrov ne fait pas de Gengis une figure angélique, contrairement à ce qui a pu être écrit. Mais, Mongol ne s’attache que très tardivement aux guerres et aux massacres perpétrés par Gengis. On trouve au milieu du film une courte scène de bataille, mais déjà on observe que Temujin décime tous ses ennemis. On dira que la gloire de Gengis Khan a été possible uniquement parce que tous ses ennemis sont morts et qu’ils ne purent jamais écrire une sa contre-histoire.

Bodrov filme ces scènes de bataille à la manière d’un chambara. Les sabres rentrent dans les corps en éjectant des giclées de sang. Cela les scènes de sabre dans le Zatoichi de Takeshi Kitano.

Mongol réussit à ne pas être un gros film bourrin comme Zhang Yimou ou Chen Kaige en on tourné récemment (La Cité interdite ou Wu Ji). Le film ressemble, toute proportion gardée, plus à Seven swords. Le fim n’abuse pas des effets numériques pour montrer une immense armée en train de se battre. Certes, dans la bataille finale entre Gengis Khan et Jamuha, Bodrov utilise le numérique mais parvient à conserver de l’humain en filmant des cavaliers face à face. Dans cette scène finale, Gengis aura perdu tout sourire et le massacre a lieu.

Ça se regarde, sans plus. Sans réel plaisir, sans déplaisir non plus contrairement au dernier film de Chen Kaige. Mongol a été nommé aux Oscar en tant que meilleur film en langue étrangère. La seule question réellement intéressante est de savoir pourquoi Asano joue un Mongole et est-ce que cela va lancer sa carrière hors du Japon. Sinon, il est très bien Asano dans ce rôle tout en douceur.

Mongol (Монгол, Russie – Allemagne, 2007) Un film de Sergei Bodrov Sr. Avec Tadanobu Asano, Soon Khon-lei, Khylan Tchouloon, Odniam Odsouren.

jeudi 17 avril 2008

Sorties à Hong Kong (avril 2008)

Love is elsewhere (愛情萬歲)

Un film de Vincent Chui avec Yumiko Cheng, Sherman Chung, Jason Chan, Chau Pak-ho, Ken Hung. 94 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 17 avril 2008.


lundi 14 avril 2008

27ème Hong Kong Film Awards : The Warlords rafle (presque) tout


Le grand gagnant de la 27ème cérémonie des Hong Kong Film Awards est The Warlords de Peter Chan Ho-sun. La super-production pan asiatique écrase tous ses concurrents qui jouaient tous dans des catégories plus modestes et plus artistiques. Bref, The Warlords a reçu les HKFA du Meilleur Film, Meilleur Réalisateur, Meilleure Photographie, Meilleurs Décors, Meilleurs Maquillages et Costumes, Meilleur Son et Meilleurs Effets Spéciaux. Pour ne faire du tout dans la demie mesure, Jet Li a même été sacré Meilleur Acteur, damant le pas à son partenaire dans le film, Andy Lau qui doit se contenter cette année du HKFA du Meilleur second rôle pour Protégé. Le film de Derek Yee reçoit aussi la récompense pour le Meilleur Montage. Les autres films n’ont plus qu’à récupérer les miettes. The Postmodern life of my aunt d’Ann Hui reçoit les awards de la Meilleure Actrice pour Siqin Gaowa et de la Meilleure Musique. Filatures / Eye in the sky reçoit aussi deux prix : Meilleur Nouvelle Actrice pour Kate Tsui et Meilleur Nouveau Réalisateur pour Yau Nai-hoi. Logiquement, c’est Wai Ka-fai qui se voit attribuer le HKFA du meilleur scénario pour Mad detective. Siu Yam-yam est consacrée Meilleur Second Rôle Féminin pour The Pye dog. Donnie Yen pourra continuer à soulever de la fonte pour montrer ses muscles dans les films d’action, ses scènes d’action dans Flash point de Wilson Yip sont récompensées. Quant au HKFA de la Meilleur Chanson, il va à celle de Love is not around. Enfin, Lust caution reçoit le Award du Meilleur Film Asiatique de l’année, mais sans Ang Lee qui était absent.

Vous pouvez retrouver toutes les nominations ici : Nominations des 27ème HKFA.

samedi 12 avril 2008

Bon à rien


Me voilà donc à regarder le premier film de Yoshishige Yoshida (je préfère ce prénom qui était utilisé à l’époque plutôt que Kijû) dont les 12 premiers films viennent de sortir en dvd. Je les regarderai dans l’ordre chronologique jusqu’à arriver au fameux Eros + massacre qui dure quand même 3h30. Rendez-vous dans quelques semaines.
Bon à rien est un film sur l’ennui, l’ennui de la jeunesse sans travail, l’ennui des travailleurs (des cols-blancs), l’ennui du fils du patron. Tout le monde s’ennuie au Japon nous dit en substance Yoshida en 1960. On veut bien le croire. En revanche, le film est tout sauf ennuyeux, ça c’est rassurant.
Tout tourne autour d’une bande de jeunes oisifs menée par Toshio. C’est lui le fils du patron. Avec Toshio, il y a trois autres jeunes et c’est à Jun que l’on va s’intéresser particulièrement. Jun ne vit pas, il se laisse vivre, il ne fait rien de spécial, il attend que Toshio leur permette de boire au bar. Ensemble, ils envisagent de voler l’argent que Makino, la secrétaire du patron, va porter chaque vendredi à la banque.
Makino est célibataire. Elle vit avec son frère et sa belle sœur, qui se disputent tout le temps. Le frère se plaint que sa femme achète tout le temps des choses. On est en plein boum économique : frigo, aspirateur, la vie à crédit va bon train. Makino mène une petite vie sans intérêt. Jun va la réveiller.
Très vite, Jun et Makino vont se chercher, le film va les faire s’attirer alors qu’ils s’opposent sur tous les points et essentiellement sur la manière d’envisager. Makino est pragmatique, dans une vision strictement petit-bourgeoise de la vie. Jun est nihiliste, délibérément en marge de la société dont il n’accepte pas les valeurs et le mode de vie. Leur relation va être électrique et contradictoire. Paradoxalement, ils sont faits l’un pour l’autre mais Makino tient absolument à intégrer Jun à sa vision lénifiante de la vie, comme lui trouver un travail, forcément aliénant. Tout cela ne va pas aller sans heurts et Yoshida est du côté de Jun. Bon à rien est critique envers la société de consommation.
Yoshida a une façon bien particulière de filmer les corps. Beaucoup de plans de profil de ses interprètes. Ils sont souvent filmés de dos et la plupart du temps à trois dans un plan comme si un corps étranger venait perturber les couples en train de se former. Le format scope magnifie les corps des acteurs qui sont souvent couchés sur leur lit, ou sur la plage dans la partie estivale. On pense très souvent à A bout de souffle de Godard, notamment pour la scène finale, mais en beaucoup plus maîtrisé. C’est très beau, très sensuel, très troublant.
Bon à rien (ろくでなし, Japon, 1960) Un film de Yoshishige Yoshida avec Hizuru Takachiho, Masahiko Tsugawa, Yusuke Kawazu, Kakuko Chino, Masao Mishima, Isao Sasaki, Junichiro Yamashita, Shôji Yasui.

vendredi 11 avril 2008

Salé sucré


Monsieur Chu est cuisinier. Il est veuf depuis seize ans et a élevé seul ses trois filles qui ont entre vingt et trente ans. Bien qu'elles soient en âge de s'émanciper, elles habitent encore avec lui.

Chaque dimanche, une tradition s'est établie : le repas familial que Monsieur Chu prépare dès l'aube. Des plats en veux-tu, en voilà. Raviolis, canard laqué, pâté de soja, coq bouilli, en tout une bonne douzaine de plats. De quoi rassasier tout un bataillon. Taipeh a beau déborder d'activités, Monsieur Chu prépare avec la tranquillité du sage les mets que l'on devine les plus fins. Hacher, pétrir, malaxer, frire, bouillir, saupoudrer d'épices. Patience, les plats se créent devant nos yeux ébahis.

Pendant ce temps, les trois filles de Monsieur Chu vaquent à leurs occupations. L'aînée, Jen est à l'église. Depuis la fin de ses études qu'elle a mal vécues, elle s'est convertie au christianisme. Bigote, elle l'est devenue. Jen est professeur de chimie dans un lycée. Elle porte une tenue stricte qui la ferait presque confondre avec les uniformes des lycéens.

Kien est la deuxième fille. C'est une battante. Elle bosse dans une compagnie aérienne où elle s'occupe de trouver de nouveaux marchés. Si elle travaille le dimanche, c'est parce qu'elle faire la preuve qu'elle est une businesswoman hyper compétente qui lui permettrait d'avoir la promotion que tous les cadres espèrent : être responsable de la compagnie dans la succursale d'Amsterdam.

Ning est la plus jeune. Elle poursuit ses études et cherche à avoir sa première aventure amoureuse à vingt ans. Ning travaille dans un restaurant de hamburgers, ce qui, compte tenu du métier du papa, en dit long sur la liberté qu'elle entend conserver. Et cela mesure aussi la liberté qu'a acquise la jeune génération de Taiwan par rapport à la précédente.

Elles seront toutes là ce dimanche, mais un coup de téléphone vient perturber le repas pantagruélique qu'ils s'apprêtent à entamer. Monsieur Chu doit filer vite dans son restaurant où un énorme problème l'attend. Les ailerons de requin se désagrègent et le restaurant est plein de clients riches et exigeants. Il va rapidement trouver la recette adéquate, avec l'aide de ses cuistots et de son associé le vieux Wen.

A ce stade du film, on le voit, tous les quatre sont célibataires et accaparés par leur travail. Leur petite routine commence à leur peser. Sort alors la phrase magique : " J'ai quelque chose à vous annoncer ", et le récit de Salé sucré bifurque vers un nouveau mouvement scénaristique.

Kien lance à ses sœurs et à son père qu'elle va quitter le cocon familial. Elle s'est acheté un appartement dans un immeuble qui est en train de se construire. Pas de chance pour elle, les promoteurs sont des escrocs et ont volés l'argent des futurs locataires. Sa vie amoureuse est fluctuante. Elle couche de temps en temps avec Raymond, un de ses anciens petits amis, mais est très séduite par Li-kai, son élégant nouveau collègue de travail.

Ning, la plus jeune, passe son temps à rencontrer Guo-lun le petit ami de Rachel, une de ses collègues au fast-food, quand cette dernière doit rester au travail plus longtemps. A force de se voir chaque jour poser un nouveau lapin, Guo-lun finit par se lier à Ning. Et un dimanche, Ning annonce qu'elle va habiter avec le jeune homme parce qu'elle est enceinte de lui.

Et Jen, la coincée, est assez séduite par Dao, l'athlétique prof de gym du lycée où elle travaille. Chaque matin, Jen trouve sur son bureau dans la salle des profs, une lettre d'amour. Elle fantasme que c'est Dao l'auteur des lettres. Mais la réalité sera toute autre. Jen prendra pourtant de l'assurance après cette déconvenue et réussira à ce décoincer et à épouser son musculeux collègue.

Monsieur Chu voit l'une après l'autre ses filles quitter la maison familiale. Lui-même est en train de se rendre compte que ses papilles gustatives le lâchent. Mais comme dit son associé le vieux Wen, " comme Beethoven ". Les filles de Monsieur Chu aimeraient tant qu'il se marie à nouveau. Et justement, Madame Liang rentre des Etats-Unis.

Car il y a encore trois personnages que l'on n'a pas présentés. Madame Liang, sa fille Rong et sa petit fille Shan-shan. Rong et sa fille sont les voisines de la famille Chu. Le veuf fait régulièrement à manger à la gamine et va jusqu'à le lui porter à l'école. La gamine est ravie et ses petits camarades sont envieux. Shan-shan et sa mère font vraiment partie de la famille Chu.

Madame Liang croit pouvoir se remarier avec Monsieur Chu. Mais elle est une " vieille sorcière ", comme dit sa fille Rong. Elle ne cesse de se plaindre, de tout, de rien et surtout de son " incapable de fille ", et pire que tout, elle n'arrête pas de fumer sous le nez du pauvre Monsieur Chu qui veut bien se remarier, mais certainement pas avec elle. Et il va se marier à nouveau. Avec qui ? Pour le savoir, il faut voir le film.

Finalement Salé sucré est un film qui commence par un repas copieux à quatre (Monsieur Chu et ses filles) et qui se termine pas un repas très copieux à neuf. Manger et boire entre femmes et hommes, voilà la recette de cette jolie petite comédie rafraîchissante d'Ang Lee. Vous avez le menu, à vous de commander !

Salé sucré (飲食男女, Eat drink man woman, Taïwan – Etats-Unis, 1994) Un film de Ang Lee avec Lung Sihung, Wang Yu-wen, Wu Chien-lien, Yang Kuei-mei, Sylvia Chang, Winston Chao, Chen Chao-jung, Lester Chan, Yu Chen, Gua Ah Lei, Hong Chi-der, Hsu Gin-ming, Lin Huel-yi.

jeudi 10 avril 2008

Sorties à Hong Kong (avril 2008)

Run papa run (一個好爸爸)

Un film de Sylvia Chang avec Louis Koo, Nora Miao, Rene Liu, Liu Yihan, Max Mok, Lam Suet, Derek Tsang, Convoy Chan, Guo Jing-lin, Ti Lung, Tiu Man-ming, Kent Cheng, Siu Yam-Yam, Michael Chan, Monica Lam. 115 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 10 avril 2008.




mardi 8 avril 2008

The Eye vs. The Eye


Au pays merveilleux de Hollywood, on n’en finit plus de faire des remakes des « classiques » des films horrifiques. Depuis cinq ans, on aura tout eu : Amityville la maison du diable, Halloween, La Colline a des yeux, L’Armée des morts, Massacre à la tronçonneuse, Sœurs de sang. A force, il ne doit plus rester beaucoup de films à refaire aux goûts et couleurs du jour. Mais des producteurs ont décidé que la nouvelle génération devait avoir leur nouvelle version. Le cas de The Eye est différent puisque nos chers Américains sont, paraît-il, incapables de lire des sous-titres en bouffant du pop-corn. Impossible de leur montrer un film parlé en cantonais et thaï. Faisons donc un remake. Ce sont deux français qui se sont mis à la tache. Moreau et Palud avaient déjà fait un sympathique et inabouti Ils. PS : si les Américains veulent garder Alexandre Aja, grand bien leur fasse. Cet homme a produit la pire bouse vue cette année : 2ème sous-sol. Une vraie merde.

Mais je reviens à The Eye. Le scénario est identique aux deux versions. Une jeune femme, la vingtaine (Angelica Lee chez les Pang, Jessica Alba chez les Français) est aveugle depuis l’enfance. Attention, elle n’est pas née aveugle. C’est pourquoi tous les espoirs pour qu’elle puisse voir à nouveau sont permis. Elle recouvre la vue après une greffe de la cornée. Passé un temps d’adaptation, elle se rend compte qu’elle peut voir les morts, et surtout les êtres qui viennent chercher les moribonds pour les amener de vie à trépas. Un psychologue (Lawrence Chou ou Alessandro Nivola selon la version) va l’aider à s’acclimater à sa nouvelle vie de voyante. Mais un jour notre héroïne s’aperçoit qu’elle voit, notamment dans les miroirs, le visage de la jeune femme qui est donneuse d’organes. Avec le psy, elle va en Thaïlande ou au Mexique (cocher la bonne réponse) pour comprendre pourquoi ceci lui arrive.

Le scénario est identique mais les ambitions divergent. Les frères Pang voulaient renouveler le film de fantômes, genre tombé en désuétude à Hong Kong, mais qui vivait à nouveau au Japon, sous des formes dégénérées (Ring, par exemple). Il s’agissait pour eux de montrer le passage entre les vivants et les morts. The Eye version Hong Kong ne fait pas vraiment peur. Le psy est très vite convaincu que la jeune femme doit rencontrer son alter ego décédée. En revanche, Moreau et Palud utilise tous les artifices classiques du montage cut pour faire sursauter. Et effectivement le spectateur sursaute dans leur The Eye, comme il le faisait dans Ils, mais sans réussir à produire une ambiance d’angoisse. Il faut dire qu’ils en mettent beaucoup plus de ces moments où la réalité se transforme en forme de flash-back ou de flash-forward, histoire de tenter de nous perturber. Si Moreau et Palud échouent, c’est que notre croyance en les morts est radicalement différente que dans le bouddhisme, car nous ne croyons pas, nous autres judéo-chrétiens, en la réincarnation.

The Eye version Hollywood met beaucoup plus de temps à s’installer. Le fait que notre héroïne soit violoniste est donné d’emblée chez eux pour évoquer les sens que Jessica Alba a développé plus que la vue. Ainsi ils peuvent jouer sur les effets sonores qui parasitent les moments horrifiques. Chez les Pang, l’orchestre dans lequel joue Angelica Lee est un orchestre de non-voyants. Ils se font plus cruels puisqu’elle est renvoyée de la formation et se retrouve toute seule, finalement bien plus seule que lorsqu’elle était aveugle. La fin de The Eye tournée par les frères Pang est là aussi bien plus noire car la jeune femme échoue dans sa mission. Difficile de dire lequel des deux est le meilleur ou lequel est le moins pire. Tout dépendra finalement de ce que l’on en attend et de son envie d’avoir un petit peu peur.

The Eye (见鬼, Hong Kong – Thaïlande, 2002) Un film d'Oxide Pang et Danny Pang avec Angelica Lee, Lawrence Chou, Candy Lo, Chutcha Ruijnanon, Pierre Png.

The Eye (Etats-Unis, 2008) Un film de David Moreau et Xavier Palud avec Jessica Alba, Alessandro Nivola, Parker Posey, Fernanda Romero, Chloe Moretz.

dimanche 6 avril 2008

Heat team


Dès le début du film, le ton est donné. Heat team sera une comédie d’action basée sur les histoires d’amour entre les deux flics qui composent cette « équipe de la chaleur », pour donner une traduction littérale du titre anglais. Dante Lam a certes moins réussi ce film que The Triad zone, mais le tout fonctionne de manière légère et enjouée.

Soit deux policiers d’Interpol : YT Li (Aaron Kwok) et KC Wong (Eason Chan). Ils sont en costume noir, cravate noir, chemise blanche sur un débardeur, ils portent les cheveux courts. Ils doivent enquêter sur Ken Ma (Huang Pin-yuan) qui s’apprête à voler des bijoux très précieux. YT et KC seront sous les ordres de Fung Bobo (Yumiko Cheng) et de l’officier Cheung (Danny Lee). L’enquête est difficile car ils ne trouvent que peu d’indices. Les deux policiers se rendent chez M. Fok (Hui Shiu-hung) qui va leur donner des renseignements. Ken Ma réussit à voler les bijoux mais il fait de nombreuses victimes. Il va s’agir de suivre la petite amie de Ken, Yu-fung (Victoria Wu), pour retrouver sa piste.

Passée cette courte présentation du film, il va sans dire que toute cette histoire de bijoux volés n’est rien d’autre qu’un habile macguffin qui permet à Dante Lam et à son équipe de scénaristes (parmi eux il y a Chang Hin-kai) de concocter une petite comédie sexuelle où tous les problèmes de couple vont être passés en revue. Car tout va tourner autour de ce sujet comme le montrait la séquence inaugurale.

Prenons nos deux flics tout simplement. YT se débat dans un célibat embarrassant. Il s’est séparé de sa copine Macy mais il la protège, il est devenu son meilleur ami. Et quand elle a des problèmes avec son nouveau fiancé, un docteur bodybuildé, c’est vers YT qu’elle se tourne. Elle le place dans une position où il ne pas évoluer. Quant à KC, il se prend pour un Don Juan et se croit irrésistible. Il est persuadé que toutes les femmes le désirent grâce à son merveilleux coup de langue. Il va ainsi faire succomber Bobo, bien malgré eux. KC trouve cet état d’attirance naturel, mais YT ne comprend pas, jusqu’à ce que KC mette sa langue dans la bouche de son collègue de travail dans une scène hilarante d’ambigüité sexuelle. Il faut dire que jusque là Heat team développait entre les deux hommes un homoérotisme assez plaisant. Après tout YT dit à un moment qu’il déteste les femmes, ce n’était qu’un juste retour des choses.

Bobo, elle, prépare activement son mariage avec Chu Yuan (Jim Chim). Mais ce dernier a surpris KC en train de l’embrasser. L’homme va se venger et se trouver une jeune fille au hasard alors que son charme est très relatif. Jim Chim arbore son plus beau chapeau et cabotine à qui mieux-mieux, comme à son habitude. Mais Bobo va tomber amoureuse de KC et demander un autre baiser, puis annuler son mariage et vouloir aménager avec KC. Elle ignore également que l’officier Cheung est amoureux d’elle. On se croirait dans une comédie du mariage de l’âge d’or hollywoodien. C’est très savoureux.

Ce qui plait dans Heat team c’est le jeu auquel se livre YT et KC qui se comportent comme des gamins alors qu’ils ont fasse à eux un grand criminel. Ils se mettent dans des situations pour lesquelles ils ne semblent pas être préparés et qui tournent à la catastrophe. On nage parfois dans le burlesque, dans un grand n’importe quoi et ils paient cher leur amateurisme malgré leurs beaux costumes, leurs grands airs et leur aplomb. Leur duo fonctionne à merveille, Aaron Kwok avec son petit air blasé et Eason Chan avec son sourire en coin. Tous les autres personnages sont à l’avenant. Heat team est un film policier dont les policiers seraient tous des gamins. Et ça c’est drôle.

Heat team (重案黐孖Gun, Hong Kong, 2004) Un film de Dante Lam avec Aaron Kwok, Yumiko Cheng, Eason Chan, Dave Wang, Huang Ping-yuan, Danny Lee, Jim Chim, Bernice Liu, Carl Ng, Viann Leung.

samedi 5 avril 2008

Cello


Hong Mi-ju est une femme troublée. Sa vie n’est pas facile. Elle est mariée et a deux petites filles, mais l’un d’elle, la plus grande, est autiste. Elle ne dit jamais un mot. La plus jeune est une enfant espiègle. Mi-ju et son époux vivent avec la sœur de ce dernier. Elle attend tous les soirs un coup de fil de son petit ami qui travaille aux Etats-Unis.

Mi-ju travaille dans une école de musique. Elle n’a pas passé le concours pour être professeur mais elle enseigne cependant le violoncelle. Une de ses anciennes élèves vient se plaindre de la mauvaise qualité de son enseignement et l’accuse d’être responsable de son échec lors d’un concours. L’élève la menace de lui faire vivre l’enfer. Mi-ju est timide mais ne se laisse pas impressionner. Dans le parking elle constate que les pneus de sa voiture sont crevés. Puis plus tard, elle reçoit d’étranges SMS qui disent « Tu n’es pas heureuse ? Tu devrais ». L’expéditeur est anonyme. Mi-ju est persuadée qu’ils viennent de son élève.

Rentrée chez elle, elle découvre que son mari a engagé, sans lui demander son avis, une gouvernante à l’air sévère. Elle ne parle. Sa famille a été décimée dans un accident de voiture. Elle a tenté de se suicider et a avalé de l’acide. Elle n’est pas une figure très rassurante, bien au contraire.

Petit à petit des événements étranges vont plonger Hong Mi-ju et sa famille dans les délices du film d’horreur, puisque Cello en est un. Des marques de griffure se forment sur le poignet de Mi-ju. Son chien, qui d’habitude n’aboie jamais, se met à aboyer puis meurt subitement le lendemain. Mais surtout, Mi-ju se met à avoir des visions, à faire des cauchemars et ne parvient plus à décerner sa réalité de ses rêves, elle sombre dans la folie. Mais la réalité ne serait-elle pas, par essence, obsessionnelle ? En tout cas, la vie de Mi-ju et de sa famille se transforme petit à petit pour sombrer dans l’horreur.

Parmi les visions de Mi-ju, il y a le souvenir, qu’elle espérait enfoui, de Tae-yun une de ses anciennes camarades d’étude, décédée depuis dans un accident de voiture traumatisant. Tout l’univers se met à tourner autour d’elle et Mi-ju est attirée dans ce trou noir centripète. Quand cette figure fantomatique apparaît, la mise en scène se transforme elle aussi. Jusqu’alors, tout était filmé en plan fixe, Mi-ju donnait son point de vue rationnel de la réalité. La réalité s’envole et la caméra se fait mouvante et encercle en travellings la pauvre femme qui devient prisonnière de ses cauchemars. Au fil des meurtres, on en vient même à se demander si elle n’est pas plus bourreau que victime.

Bine sûr, tout cela ne renouvelle pas le genre. Mais en cette période où le film horrifique fait dans le postmoderne ou pire se contente de ne faire que des remakes, Cello est un petit film d’artisan tout à fait sympathique.

Cello (첼로, Corée, 2005) Un film de Lee Woo-cheol ave Seong Hyeon-ah, Park Da-an, Jeong Ho-bin, Wang Bit-na, Jin Ji-hee, Jeong Yoo-mi, Kim Na-woon.

vendredi 4 avril 2008

Love my life


Tout compte fait, les films japonais “lesbiens”, c’est super rare. Je crois même que c’est la première fois que j’en vois un. Celui-là va passer au Festival Vues d’en face à Grenoble en avril avant une éventuelle sortie en DVD.

C’est l’histoire toute simple de deux étudiantes, Eriko et Ichiko, qui vivent tranquillement sans rien demander à personne. Le film commence par une séparation. Enfin, plutôt que l’une va à la fac au petit matin après avoir passé la nuit chez l’autre. Tout va bien pour nos deux tourterelles, elles s’aiment et se font de jolis sourires sur fond de rock japonais. C’est le groupe Noodles (que des filles) qui illustrent la bande son. Malgré cela, elles sentent le besoin d’annoncer à leurs pères respectifs qu’elles sont lesbiennes et qu’elles sortent ensemble. Seulement les papas car elles n’ont plus leurs mamans.

Ichiko commence le coming-out. Son père écoute attentivement et annonce tout de go que lui-même est gay et qu’il a un mec. Etonnement de sa fille unique et du spectateur. D’autant qu’une révélation ne vient jamais seule. Il déclare également que son épouse aimait les femmes et que leur mariage n’était que pure convention sociale. Le coming-out d’Eriko se passe beaucoup moins bien. Son père est avocat. Il est un membre respecté et respectable de la communauté. Il considère l’homosexualité de sa fille comme un acte de rébellion envers l’autorité, d’autant qu’Eriko, à l’instar de son père, suit des études pour devenir avocate.

Etonnement Love my life ne se place pas dans la case du film à thème : je suis lesbienne et la société me brime. Au contraire, le ton reste celui de la comédie douce-amère (plutôt douce qu’amère) pour tout le monde comprenne tout le monde. On commence kawai et on terminera kawai. Bien entendu, il y aura un moment où Eriko se demande si elle ne devrait pas rompre, mais en fait elle veut juste prouver à son père qu’elle peut mener de front sa vie sentimentale et sa future carrière d’avocate. Sauf qu’elle a oublié de prévenir sa chère et tendre.

Quant à Ichiko, elle va aider un de ses camarades de fac à s’assumer. Cet étudiant est homo mais n’ose le montrer et il est la tête de turc des autres étudiants mâles. Ichiko, pour lui éviter un harcèlement trop intensif, va se faire passer pour sa petite copine, jusqu’à ce qu’il assume la situation.

Love my life est un gentil petit film indépendant qui ne casse pas trois pattes à un canard mais se déroule avec franchise. Au bout de moultes conversations (dans la rue, au téléphone) sur leur avenir, sur l’amour, sur le bonheur, les personnages du film se retrouvent finalement dans la chambre pour une petite scène de bisous. Kawai, donc.

Love my life (Japon, 2006) Un film de Kôji Kawano avec Rei Yoshii, Asami Imajuku, Naomi Akimoto, Miyoko Asada, IsseiTakahashi, Takamasa Suga.

jeudi 3 avril 2008

Sorties à Hong Kong (avril 2008)

Scare 2 die (嚇死你)
Un film de Cub Chien avec Sam Lee, Ellane Kong, Tommy Yuen, Derek Tsang, Raymond Wong Ho-yin. 85 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 3 avril 2008.






Three kingdoms Resurrection of the dragon (三國之見龍卸甲)
Un film de Daniel Lee avec Sammo Hung, Andy Lau, Maggie Q, Andy On. 102 minutes. Classé Catégorie IIB. Sortie : 3 avril 2008.